19 févr. 2013

Frapper le mur de la chimio


Les cheveux qui tombent, c’est une chose.  Mais quand le moral s’échoue sous mon lit juste à côté de ma libido poussiéreuse, là c’est sérieux.

J’ai trois séances de chimiothérapie en arrière de la cravate et il me semble que je suis au beau milieu du désert accrochée sur le dos d'un chameau qui marche sur les genoux.  J’épuise tout le monde autour de moi avec mes babounes de martyr éplorée.  Tout ce que je mange goûte le carton, les livres que je tente de lire sont insipides, le soleil n’est pas éclatant comme je le souhaiterais et mon linge n’est plus assez mou.  Il me reste trois cils sur un œil et quatre sur l’autre.  Si je continue à prendre la position fœtale, je vais rouler plutôt que marcher.

Je suis dans ma phase Yoko Ono en deuil.  La célèbre veuve a caché ses sombres humeurs derrière ses lunettes fumées pendant plusieurs années jusqu’à ce que son miroir lui renvoie l’image d’une femme aigrie. 

« C’est mauvais », a-t-elle admis.  « Je suis en train de me rendre malade, je suis irritable et je suis un triste exemple pour mon fils Sean » a-t-elle confié à la presse.  Le chagrin de Yoko était si grand qu’il empoisonnait même l’existence des gens qu’elle aimait le plus au monde.

Certains font du yoga pour retrouver la paix en eux.  Yoko a opté pour la gymnastique du sourire.  Plantée devant son miroir, une-deux-une-deux, elle a répété "cheeeeeze".  Cette empreinte de banane sur son visage a fini par déteindre sur son âme :  Yoko a retrouvé un peu plus de sérénité.  Forte de cette expérience révélatrice, elle a invité les gens à lui envoyer des sourires via twitter. 


Je lui envoie les miens.  Tiens, Yoko :  je me griffe un sourire sur le visage.  Même si ça fait mal pour le moment, je crois à ta méthode.



Et je prendrais bien vos risettes pour les mettre dans ma besace...Il y a encore du chemin à faire juchée sur mon chameau dans le désert ;)

Souris, la vie est un fromage.

1 févr. 2013

La fin de la souffrance de Janvier


J’écris «  1er février » et je réalise qu’on est le 31.  Il y a 31 jours en janvier, cet interminable mois où il mouille, il vente, il gèle, il grèle.   Un mois où les moineaux sans cervelle picorent des graines au lieu de voler vers le sud.  Un mois où il faut être un chien husky pour goûter au réel bonheur d’être né sous un climat aussi rugueux qu’une roche.  Un mois de soupe pour réchauffer le ventre, les épaules, les pieds et le bouts des doigts.  Dites-moi que ça va finir.  Racontez-moi une histoire qui ne se passe pas dans un palais de glace où il est impossible de faire l’amour.  Qui donc va s’envoyer en l’air dans un hôtel de glace sans porter des collants en laine et des mitaines en polar?  La nordicité, concept amère pour consoler les pauvres descendants des colons que nous sommes, habités par les chagrins de nos aïeux qui en ont bavé, terrés dans leur maison calfeutrée avec  de la guenille. Janvier, aussi douloureux qu’une langue collée sur un poteau gelé.

Trente et un jours lancinants.  Trinquons, mes amis.  Nous avons terminé la traversée du désert polaire.  Février arrive avec ses jours plus longs et son soleil un peu moins blafard, un peu plus lumineux.  Gardez la foi, les fous en bicycle continuent de pédaler sur les trottoirs savonneux au péril de leur vie.  

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Admirez le paysage lunaire qui bientôt deviendra vert et grouillants de larves de maringouins.  La vie surgira.  Et moi, je vais me chercher une job et dilapider mon premier chèque de paie égoïstement.  Je vais claquer du cash sur des gougounes pour me rassurer sur l’avènement d’une mythique saison qui nous tourne tous la tête :  l’été.