28 mai 2012

Le québécois en accéléré pour la belle Délia


Délia, animatrice-radio à Calédonie 1ère, débarque sur la plage avec son micro pour les vox pop destinés à une chronique rigolote sur la langue française.  Elle se pointe généralement le mercredi à la Baie des Citrons.  Tout le monde connaît Délia et son rire en cascades.  Elle surgit alors que j’ai le popotin vissé sur le bout de ma micro-natte, un livre ouvert sur le pif, faisant la sieste ni vue ni connue.  Quelle flemmarde je suis!  C’est à ce moment que Délia se pointe, curieuse comme une belette avec ses 36 questions.  Sa bonne humeur contagieuse me tire à tous coups de ma léthargie et on finit par papoter comme des mémères.
Le concept est simple :  une série d’expressions pour laquelle je dois trouver une explication socio-historico-culturelle puisée à même le riche lexique de la langue française.

« D’où vient l’expression casser sa pipe? », demande-t-elle avec son invariable sourire dans la voix.

Et moi, grosse patate, je me dépatouille comme je peux pour masquer mon ignorance. Dis-moi, Délia, qu’est-ce que ça veut dire?

« Sur les champs de batailles des guerres napoléoniennes, les chirurgiens n'ayant pas d'anesthésiant pour opérer, plaçaient une pipe en terre cuite entre les dents du patient pour qu'il la morde au lieu de crier. Le soldat qui succombait au cours de l'opération laissait tomber sa pipe par terre où elle se cassait »

Et dire que je l’avais sur le bout de la langue…

« et chaud lapin?  Et avoir le bourdon? Et ce n’est pas à un singe qu’on apprend à faire des grimaces? ».  Elle n’est jamais à court, la Délia.  Donnez lui un zoo et elle vous dégottera une expression pour chacune des peluches qui s’y trouvent.  J’en perds mon latin.  Bouche bée.  Plutôt que de faire l’autruche, je lui ponds des explications saugrenues.  Rien n’y fait, mes définitions excentriques ne la découragent pas.  Il lui faut bien une tête de turc dans son show de radio.  Chère Délia, s’il y a un poste de fou du roi à ton émission, tu penses à moi.

Sache que j’ai dans ma besace quelques perles du terroir qui ne sont pas 
piquées des vers.  Tu ne m’en voudras pas si je les décline en québécois?
Quand on baragouine de midi à quatorze heures, on risque de s’épivarder pis de dire ben des niaiseries.  Faut pas s’énerver le poil des jambes et respirer par les narines.  Profondément.  Mets tes barniques ben carré sur ton nez pis regarde moi quand je me lâche lousse en parlure québécoise.

bazzotv.telequebec.tv


Un chaud lapin, ma chère Délia, ça pourrait être un Gino Camaro.  À condition que les bottines de notre Gino suivent les babines et ce n’est pas toujours le cas.  Le Gino, il préfère chauffer son char et péter de la broue avec son foin dans les clubs.  Boire des drinks avec les pitounes.  Pis rentrer chez lui la kékette sous le bras parce qu’il est rond comme une binne.  Bonsoir le chaud lapin!

Avoir le bourdon, c’est faire la baboune.  Quand tu files comme ça, tu te fiches de tout comme dans l’an quarante.  Pourquoi l’an quarante?   Encore une autre de nos expressions capotées qui pourra te faire paraître comme une fille avec ben de la jarnigoine si jamais tu réussis à coincer ça dans une conversation!

Et ma préférée :  ce n’est pas à un singe qu’on apprend à faire des grimaces…Notre premier ministre, Jean Charest, est en train de s’étouffer avec celle-là.  Tu dois être au courant, Délia, la nouvelle a fait le tour de notre planète :  la jeunesse québécoise est en beau joual vert parce qu’on veut leur en passer une p’tite vite en augmentant les frais de scolarité.  Y’a de quoi manger ses bas quand tu négocies avec des faces à claques qui bizounent des ententes sur le coin d’une table.  Faque les jeunes ont décidé de bardasser.  Du béding-bédang pendant 15 semaines.  Ça a fini par venir à bout de la patience du gouvernement.  Charest a dit , « ça va faire, ma gang de malades, on vous plante une loi spéciale.  Plus le droit de manifester avec les guéguettes en l’air partout dans la ville! » 

Le gouvernement pensait s’en sauver.  « Ce n’est pas à un singe qu’on apprend à faire des grimaces… »  Ben quoi, les lois spéciales, on a déjà vu ça pour clouer le bec des grévistes.  Mais une de même, c’était une vraie vingnenne.  Pas vargeux.  Y’a ben des citoyens qui avaient le moton.  Les jeunes, les vieux, les enfants…Tout le monde a sorti son chaudron pour tapocher ben fort dessus.  "Faut pas lâcher la patate", qu’ils se disent.  Soir après soir, pas pissou pour deux cennes, ils sortent dans les rues.  « Slaque la poulie, Monsieur Charest! Fais en des grimaces, nous on va t’étriver avec nos slogans.  Attache ta tuque avec de la broche »  C’est triste un singe qui ne fait plus de grimaces…Mais d’un côté comme de l’autre, on sens que le tataouinage achève.  L’été s’en vient.  On n’a pas les moyens de scrapper la belle saison.  Les étudiants vont retourner négocier.  Accroche ton chapelet sur la corde à linge, c’est peut-être le début de la fin qui s’en vient.  Ou bedon des élections.  Va savoir! 



Voilà ma belle Délia, quelques unes de nos expressions colorées de notre truculent terroir.

C’est tiguidou?  A la revoyure!



27 mai 2012

souffrir à l'île la plus proche du paradis


L’île des Pins baigne dans une aura de star.  Ce coin de paradis ciselé comme un diamant brut est le refuge des touristes de tout le Pacifique.  Les japonais raffolent de ses plages sauvageonnes.  Les australiens débarquent en grappes pour venir y poser leur serviette bariolée aux couleurs de leur paquebot de croisière;  ils font saucette dans la piscine naturelle et repartent avant le coucher du soleil.  Les calédoniens y font leur pèlerinage nature.  Les nouveaux mariés y roucoulent à l’ombre des cocotiers.

C’est l’incontournable destination de la Nouvelle-Calédonie.

Pas étonnant que les producteurs de la télé-réalité Koh-Lanta, la version française de Survivor, aient choisi l’endroit pour l’édition 2005.

Regardez l’intro et vous comprendrez pourquoi cette toute petite île de 14 kilomètres par 18 a fait mouche auprès des producteurs.



La pirogue est le plateau de l’animateur au milieu de la baie d’Upi.   Nous aussi avons eu l’immense bonheur de se retrouver dans cette grande baie plantée d’étranges cailloux.   Une tortue est passée près de nous.  On a crié notre joie comme des touristes.  Et oui, nous sommes des touristes toujours prêts à battre des mains dans le sillage des bêtes sauvages.





Et dire que les bagnards enchaînés au fond de leur cellule ont maudit cet endroit.  Les déportés de la commune de Paris ont cherché à fuir au péril de leur vie à la fin du 19e siècle .  L’île des Pins a entendu les cris désespérés des déracinés sans jamais pâlir de sa beauté. 

On a presque pleuré en partant.  Je ferais bien une très très longue télé-réalité près de la baie de Kuto.  Une plage comme ça, c’est une souffrance comme je l’aime.  Délectable.

















14 mai 2012

Ces petites choses de la vie


Du Gong-Show


Nous avons fait la rencontre d’un beau gros gras sans complexe qui flirte de façon éhontée…Un pétard incontesté qui groove avec ce je-ne-sais-quoi d’irrésistible…Un showman, c’est vrai, mais qui finit tout de même par lâcher son public sans crier gare pour aller se goinfrer avec autant de délicatesse qu’un outre-mangeur anonyme  qui a craqué.

Non, ce n’est pas Elvis version Las Vegas aperçu sur une île déserte du Pacifique.  Décrochez!  Le King se régale au paradis des paillettes et c’est très bien ainsi.

Je vous parle d’un animal étonnant :  le dugong.  Une tondeuse qui avale 40 kilos d’herbe quotidiennement.

Nous avons fait la rencontre du 3e type lors d’une expédition à Thio. 

Un face à face inoubliable avec Du Gong-Show :  c’est comme ça que je l’ai baptisé.  Tout le monde connaît Du Gong-Show à Thio sur la côte est.  Il a une balafre sur le dos s’apparentant à un cœur sur lequel on aurait labouré deux ou trois autres coups de griffes.  Peut-être la résultante d’un coup d’hélice de bateau.  Certains dugongs sont parfois mortellement atteints.  Et leur nature débonnaire n’est malheureusement pas un gage pour leur survie devant les chasseurs-rapaces qui les tuent pour la « finesse de leur chair ».  Un steak de dugong qui s’avale de travers quand on sait qu’il s’agit du mammifère marin le plus menacé de la planète.

Un drôle de moineau que ce spécimen :   une vache marine lointaine cousine…de l’éléphant!  C’est à se demander s’il n’y avait pas déjà des couples échangistes dans l’arche de Noé.  Et cette autre information qui fera baver d’envie vos adversaires dans une joute de Quelques Arpents de Pièges :  le dugong barbarouffe.  Il QUOI?  Je vous le dis, il barbarouffe.  Son cri est le barbarouffement, dixit Wikipédia.  C’est aussi le son que j’émets lorsque que je me lève le matin après un souper bien arrosé avec une pile de vaisselle sale et une gueule de bois.  Je barbarouffe comme un dugong.

Du Gong-Show s’est pointé impétueusement en chargeant Chéri.  Un gros balourd de deux mètres qui doit faire dans les 500 kilos -si ce n’est pas plus- et qui vient quérir son câlin. Ça surprend. 

Du Gong-Show avait déjà batifolé pendant une bonne partie de l’après-midi avec une bande de baigneurs mais il n’avait pas eu sa dose.  Lulu, Clopinette et Princesse des îles ont pris le relais et ont fait une petite séance intensive de nage synchronisée avec la sirène dodue.  Dois-je vous dire que le soir venu, nous n’avons parlé que de ça pendant tout le souper? 

Mais Du Gong-Show est-il un mâle?  Là est la question…Je serais tenté de vous dire oui parce qu’il m’a décoché un sourire enjôleur sous l’eau et j’en suis encore toute remuée.  Une espèce rare comme celle-là, c’est sûr que ça vous kidnappe le cœur.

Je termine en joignant ces clips trouvés sur Youtube. Du Gong-Show de Thio a fait pas mal de films! Je remercie les réalisateurs pour ces moments magiques.  Merci de me permettre de partager le ballet de celle que l’on surnomme la Dame de la mer.  J’espère que le dugong ne deviendra pas un lointain souvenir exotique raconté par mes enfants une fois qu’ils seront devenus grands-parents. 

    

8 mai 2012

Sur la route de Goro


On s’enfonce sur la pointe sud en empruntant une route qui frise en lacet le long des corniches.  Des virages en épingles et quelques manœuvres pour éviter les nids de poule grandeur cratère lunaire.



Nous avons fait cette promenade par un beau mardi de congé de mai.  Après la fête du travail du premier mai, le pédagogique du lundi, les ponts, les vacances scolaires de deux semaines qui s’en viennent, j’avais complètement oublié le congé du 8 mai 1945 pour souligner l’armistice.  Neuf jours d’école en mai, ça vous laisse le temps de jouer au touriste!





On a fait la petite boucle de la route du sud vers le lac Yaté en coupant vers la chute de la Madeleine.  « Wow, on dirait Niagara! », a remarqué Princesse des îles.  Niagara à l’échelle d’une Barbie avec une hauteur d’un peu plus de 3 mètres.  Mais elle est jolie cette dentelle d'eau vive dans son écrin de rivière bordée de roches noires.  D’autant plus que le parc aménagé tout autour est absolument impeccable.  On se croirait en Nouvelle-Zélande tellement tout est propre et ratissé avec soin.  



Sur le sentier, les enfants me confient avoir l’impression de se retrouver au bout du monde comme s’ils avaient été lâchés dans un film de dinosaures.  Ça s’explique par le caractère endémique de la flore qui nous entoure.  95% des végétaux ne se retrouvent nulle part ailleurs qu’ici dans cet étonnant pays.  Nous nous trouvons au cœur du maquis minier calédonien.  Sous nos pieds, une soupe de fer, chrome, nickel, aluminium :  pas une terre des plus fertiles!  

Et pourtant, des fleurs d’une incroyable beauté poussent au milieu de cette plaine qui fait la joie des cyclistes et amateurs de plein air.

Je sens que nous allons revenir souvent dans le coin.













Sauter dans le vide


J’ai reçu un jour le courriel d’un homme qui se demandait si la Calédonie venait avec un fond de pension.   « Je songe à postuler pour KNS  et/ou Vale.  Je me demande si ces entreprises offrent de bons régimes participatifs? », me demandait-il .  C’est une très bonne question mais je ne suis pas sûre que c’est celle qui doit apparaître en tête de lice…On ne vient pas ici pour remplir son bas de laine.  On vient ici pour faire le plein d’expériences toutes confondues:  extraordinaires et  difficiles.  On ne sait jamais sur quel chocolat on va tomber quand on pioche dans la boîte.

La Calédonie, c’est la vie qui défile alors point besoin de songer à ses vieux jours.  C’est l’instant présent, ici et maintenant.  C’est faire une croix sur ses possessions et partir sans jamais regarder en arrière.  Pour certaines mamans, c’est laisser l’aîné se lancer seul dans la vie et essayer de le ramasser de temps en temps à la petite cuillère malgré les 14 000 kilomètres qui vous séparent de lui.  Pour de jeunes grands-mères expatriées, c’est faire des biscuits avec les petits-enfants sur Skype.  Pour d’autres, c’est affronter la maladie en faisant confiance à ses nouvelles voisines dans le quartier.  C’est aussi parfois apprendre qu’un proche est décédé et pleurer pendant deux jours dans l’avion avant d’arriver à ses funérailles et déposer une fleur sur sa tombe.  C’est dire non à Noël, à l’anniversaire de mariage de ses parents, à l’été des indiens, aux soupers de sacoches avec les copines.  C’est réconforter sa sœur avec des mots plutôt qu’avec ses bras.

C’est surmonter les petits deuils du quotidiens.  C’est aussi apprendre à vivre autrement.  Cultiver la proximité malgré les 3 continents qui nous séparent de l’essentiel :  les êtres qui nous sont chers. 

Dans mon cas, c’est apprendre qu’il y a une vie après le bulletin de 18 heures.  Les lumières du studio se sont éteintes pour la lectrice.  Mais moi, je brille encore.

7 mai 2012

La côte est de nos amours


Des mains qui battent l’air à votre passage pour vous saluer.  Des sourires fendus jusqu’aux oreilles.  Des garnements à vélo qui font la course avec vous.  La côte est de la Nouvelle-Calédonie est pavé de bonheur.  Rouler entre la mer et la montagne sur une route ombragée par la végétation luxuriante est un réelle plaisir.  On se tord le cou à s’en étourdir.    

Ne vous étonnez pas si les enfants ne vous demandent jamais « quand est-ce qu’on arrive… »  On lève le pied et on admire.


Je vous offre une petite virée avec nous sur cette charmante route.

2 mai 2012

L’indolence du luxe.


Qu’est-ce que le luxe?  Un bijou scintillant comme l’effigie d’une jaguar à un feu rouge?  Avouez que vous avez regardez deux fois plutôt qu’une pour voir qui était au volant…Le luxe attise la convoitise.

Est-ce le clinquant d’une sculpturale quadra aux seins siliconés posant avec diamant et talons hauts dernier cri dans un bar de la brousse?  Je vous ai vu, vous avez étouffé un petit rire devant l’étalage criard d’une vulgarité sans complexe.  Le luxe divise.



Ou au contraire, le luxe serait-il un code secret?  Une coupe de champagne dans laquelle vous baignez vos lèvres tout en vous demandant s’il s’agit ou non d’un bon millésime?  Et ce tableau obscur dans le salon design de vos hôtes?  Une croûte ou l’œuvre d’un génie?  C’est le traquenard du luxe :  il faut être un initié pour savoir apprécier.

Et vous, votre définition du luxe?  Une débauche de shopping à New York?  Une semaine de yoga sur un carré de pelouse verdoyant à Bali? Une femme de ménage une fois par semaine?  Une heure libre qui surgit dans votre agenda débordé?  Un tête-à-tête avec un gogo boy?

Je vous pose ces questions parce que je suis moi-même en quête d’une réponse pour savoir ce qu’est le luxe.  Dans mon ancienne vie de lectrice-de-nouvelles débordée-mère-de-trois-enfants, j’ai fermé les yeux très fort en me disant que le luxe était au bout du monde dans ce Pacifique lointain.  Je joggais sur ma rue et je sentais que j’allais m’envoler lorsque Will.i.am scandait dans mon Ipod : 

Imma be, Imma be…Imma be living the good life, Imma be living the good/good life…

Imma be.  Un mantra, une auto-proclamation, un slogan pour la croissance personnelle.  Je réalise en ce moment le fantasme no. 1 de la plupart des nord-américains avides de luxe :  avoir du temps pour soi.

47 ans, retraite précoce forcée, trois enfants et zéro couche à changer.  Le rêve.

C’est un luxe inouï de s’offrir une page blanche.  Un grand défi aussi. 

Je prends le temps de trouver ma propre définition du luxe.  Je ne sais toujours pas s’il s’agit de ces après-midi indolents longs comme une messe du dimanche.  Ni de mes premiers coups de pinceaux sur une toile.  Ou de mes douloureux joggings alors que je longe le Pacifique en rêvant d’y glisser un jour en kitesurf. 

Des questionnements et quelques certitudes.  Pour moi, le luxe est désir.  Le tressaillement d’excitation quelques jours avant le départ dans une contrée lointaine, c’est un luxe incomparable.  C’est pour ça que je nourris sans cesse des projets fous.

Le luxe est aussi décomplexé.  Il n’est pas l’esclave des vêtements griffés ou encarcané dans l’intégrisme du beau.  Le luxe est authentique :  un dessin d’enfant richement mis en valeur dans un cadre doré, une sculpture de Pouebo achetée lors d’une balade sur la côte est.  Un raid dans la brousse au coude-à-coude avec nos amis.  Une guacamole avec des avocats cultivés par le voisin.

Le luxe, c’est l’instinct du moment.  Imma be…

Living life, feeling free.
Powerful with energy.
Sending positivity.
Come to my festivity.
Celebrate like Imma be.
Imma be.
Imma be.


1 mai 2012




Jésus flash les lumières



Voici l’ado debout dans la cuisine avec une brassée de linge sale dans les bras.  Son linge sale.  Un portrait aussi mystifiant que le sourire de la Joconde.  Mais la surprise, c’est la bulle qui jaillit au-dessus de son auréole de cheveux tempétueux et qui se lit comme suit :  « M,man, peux-tu me dire comment fonctionne la machine à laver? »  Je n’ai pas rêvé, il a bien prononcé ces mots.

Je ne suis pas en train de vous révéler un fantasme enfoui dans mes rêves les plus fous.  Il s’agit bel et bien de l’aîné Lulu, le sourcil en accent circonflexe, animé d’une curiosité sincère parce qu’il veut savoir comment dompter la frontale dans la salle de lavage.  

Nous allons sonder ensemble les mystères des différents cycles.   En moins de deux minutes, il a compris la subtilité entre coton, synthétique, soie et extra rinçage.  Tout baigne.

Une fois la leçon terminée, je m’attaque à la tâche ingrate du décorticage des crevettes et là, une autre surprise m’attend :  la cadette, Clopinette, surgit à mes côtés pour me poser la colle du jour :  « Maman, comment on fait les crevettes coco?  Je vais t’aider! »

Je cherche la caméra cachée…Il y a certainement un producteur de Surprise!  Surprise! dans notre maison!  Pourquoi cette conspiration soudaine?

Et je finis par comprendre…Cette lueur qui brille, c’est la lumière au bout du long tunnel de la crise d’adolescence.   Mes deux plus vieux ont fièrement guerroyé pour imposer leur identité mais il semble que le drapeau blanc soit déjà sur le point d’être hissé. 

Il y a de l’espoir…Jésus existe.

La benjamine, Princesse des îles, entre en scène avec son Ipod tonitruant le dernier tube de M Pokora.

« Tu peux baisser le volume un chouilla, ma jolie? »

Une simple remarque et c’est comme si je lui avais versé de l’acide sur le corps.

« Ah, là!  Faut toujours faire ce que vous dites! ». lance-t-elle avec les bras en croix comme la victime qu’elle est soudain.

Un constat s’impose :  il y a encore quelques rounds à venir dans cette arène où l’adolescent défend âprement ses positions.  Heureusement, mes deux plus vieux ont aiguisé mes réflexes de mère zen.  Je me fend d’un large sourire et susurre à ma plus jeune deux options pour un repli stratégique dans ce début de bataille de tranchée :  c’est le Ipod ou la chambre capitonnée.

Le Ipod me tombe dans les mains. 

Je crois que je viens d’obtenir mon grade de général grâce à mes ados.  Mais Jésus, ne me lâche pas!  

Two down, one more to go.